Pretoria pourrait être contraint d’arrêter le président russe dans le respect de ses obligations vis-à-vis de la justice internationale, notamment le Statut de Rome. Le gouvernement de Cyril Ramaphosa ne cache pas son inquiétude.
Depuis que la Cour pénale internationale (CPI) a émis le 17 mars un mandat d’arrêt contre le président russe Vladimir Poutine pour des crimes de guerre présumés en Ukraine, tous les regards sont tournés vers l’Afrique du Sud.
Une question est sur toutes les lèvres : le chef du Kremlin attendu le 24 août 2023, en marge des travaux du 15e sommet des BRICS, sera-t-il remis à la justice internationale ?
Ce mouvement reste hypothétique. Mais le sujet est l’objet de tensions au sein du pouvoir sud-africain.
Le mandat d’arrêt « est évidemment un sujet de préoccupation » a reconnu le 24 mars Naledi Pandor, la ministre sud-africaine des Relations internationales et de la Coopération.
L’Afrique du Sud est signataire du Statut de Rome depuis 1988. Nelson Mandela en était alors le président.
Les autorités rappellent depuis plusieurs jours à la fois la position de non-alignement de l’Afrique du Sud sur le conflit russo-ukrainien et son attachement au principe de légalité en tant qu’Etat.
L’imbroglio est donc actuellement en discussion sur le plan juridique. « Nous attendons un avis juridique sur la question », a notamment déclaré la ministre Naledi Pandor.
L’affaire Omar el-Béchir en dit long
En juin 2015, la visite d’Omar Al-Bashir, alors président du Soudan, secoue le pays. Il faisait l’objet de deux mandats d’arrêt de la CPI pour génocide et crimes contre l’humanité.
Dix jours avant le 25e sommet de l’Union africaine, le gouvernement du président de l’époque, Jacob Zuma, avait assuré par écrit à tous ses hôtes qu’ils seraient couverts par l’immunité diplomatique attachée à leurs fonctions. Mais alors que s’ouvrait ce sommet des chefs d’Etat à Johannesburg, trois juges de la Haute Cour de Pretoria, saisis d’une plainte de l’organisation South Africa Litigation Center (SALC), avaient ordonné d’empêcher tout départ du président soudanais, le temps d’en délibérer.
Vingt-quatre heures plus tard, ils ont exigé l’arrestation d’Omar Al-Bashir. Mais l’ancien président était déjà dans un avion pour Khartoum.
Les juges avaient alors sommé l’Afrique du Sud de s’expliquer à La Haye. La société civile avait accusé le gouvernement d’ignorer les décisions de ses propres juges.
Depuis le lancement du mandat d’arrêt le 17 mars, le parti au pouvoir – l’ANC – ne s’est pour l’instant pas exprimé. Il laisse au gouvernement le soin de trouver une issue.
De son côté, l’opposition a demandé au chef de l’Etat de refuser d’accueillir Vladimir Poutine.
Comme les 123 membres de la Cour, l’Afrique du Sud a ratifié le statut de la CPI et aurait donc, selon ses juges, l’obligation d’exécuter tous ses mandats d’arrêt. La question est néanmoins controversée.
Certains prétendent qu’un pays doit respecter l’immunité des chefs d’État qui n’ont pas rejoint la Cour. C’est bien le cas de la Russie.
Avec Africanews
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